Olivier Guez La disparition de Josph Mengele prix Renaudot 2017 ou De l'inhumain à l'humain par Antoinette RABAZZANI

📅 25 décembre 2017

LA DISPARITION DE JOSEF MENGELE de Olivier Guez

Sur les traces de l'un des plus terribles criminels nazis, le médecin d’Auschwitz Joseph Mengele, Olivier Guez produit un roman plus proche du travail d'investigation que de la fiction en racontant la deuxième vie de « l’ange de la mort » en Amérique du Sud. C’est vrai qu’il est à la fois écrivain et journaliste et il le prouve avec son impressionnant travail de documentation proche de celui de l’historien.

Il semble que l’auteur ait eu plusieurs objectifs dans la réalisation de ce roman-vrai.
On perçoit cette dimension historique quand il donne une explication très fouillée du contexte politique. On y trouve l’Argentine complice du dictateur Peron qui l’accueille à Buenos Aires, le contexte de la Guerre froide et le conflit israélo-palestinien avec la guerre des six jours.
Car est-ce vraiment un roman ? Les rêves de Mengele sont sûrement romanesques mais ce n’est là qu’une enveloppe de ce qui est, avant tout, une démarche historique et politique.
Décrire le tortionnaire le plus redouté d’Auschwitz et le montrer ensuite dans toute sa médiocrité d’homme malade, mégalomane progressivement totalement paranoïaque, est probablement une des premières finalités de l’ouvrage.

On serait même tenté de penser qu’Olivier Guez est porteur d’une mission, celle de la mémoire. C’est en effet une façon de la raviver et de rendre hommage aux victimes du monstre. Celui-ci n’a pas eu de procès, contrairement à Eichman, l’officier SS responsable de tout le transport des déportés vers les camps de la mort, jugé et pendu en Israël en 1962 et qui lui inspirait tant de mépris.

Et pourtant, l’auteur qui insiste sur la lâcheté de Mengele, jusqu’à la paranoïa, semble avoir voulu développer cette idée de longue et lente torture qu’il aurait subie, au cours de son ultime période de fuite. Une torture finalement plus intense encore qu’un procès ou qu’une exécution. En effet, cette perte de dignité dans une situation totalement dégradante chez cet homme éternellement mégalomane, ressemble fortement à une descente aux enfers. Cet homme, auteur d’atrocités à Auschwitz, capable de collectionner les yeux bleus de ses cobayes, devient peu à peu une épave, obsédée par la justification de ses actes passés, ce qui lui donne finalement, un aspect étonnement… humain.