Combien de regards
Ai-je jeté dans la benne
Qu’au fond, les miroirs
Te réfléchissent encore ?
Tant d’aubaines pupilles
A l’aube et de nocturnes paupières
Se sont approchées
Du nez de ton nez
En cette armoire blanche
Dont je fracasse la mémoire
Toute accumulée dans les tiroirs
Démantelés pendant cette avalanche.
Tant d’années
Que je pulvérise
Ainsi en cette casse
Le souvenir d’intimes soucis
De corps nus reflétés
Mouillés et fragiles
De chignons relevés
Sur ta nuque où dégoulinent
Encore des gouttes au prisme d’arc en ciel
Et des boucles d’encre violine
Tatouées sous le sel de ta peau.
Tant d’étrangers tant d’étrangères
Giclant de la boite ont pissé
À satiété des oboles au lac
En ignorant du placard
Les œillades figeantes.
Adieu l’immémoriale !
Qui est en cet instant
D’elle ou de moi la plus banale
Ordure en la benne gisant ?
Jeune femme à sa toilette" (1875) de Berthe Morisot