Revue littéraire en ligne
Publication de texte, poésie et roman numérique
L’Altérité se destine :
- A créer un site d’échange d’idées, une sorte de club de réflexion à travers la publication de textes portant sur des thématiques propres à mieux comprendre notre monde ; et de former ainsi un espace sans frontières entre la littérature, la philosophie, l’économie et toute autre discipline puisant son authenticité dans l’histoire de l’homme, à laquelle des modèles quantitatifs et rationnels souhaiteraient substituer un homme sans histoire. L’accès à cet espace de publication de chroniques est gratuit pour tous les internautes désirant nous rejoindre.
- A mettre à disposition une maison d’édition en ligne très impatiente de connaître et de faire partager une production littéraire variée : manuscrits oubliés dans un tiroir, écrivains encore anonymes, talents cachés, mémoire évoquée, essais, romans épistolaires, chroniques littéraires…
L'actualité de la semaine
Les éditions « Encres Vives » ont été fondées en 1960 par Michel Cosem, décédé en 2023. Avec l’accord d’Eric Chassefière, directeur de la publication, la revue L’Altérité est heureuse de présenter quelques-uns des auteurs qui y collaborent ainsi que leurs œuvres.
"Couché dans l'eau verte, sous le cul du cumulus dont il voit les tuyaux, les soupapes et tout le toutim que de toute façon il ne peut expliquer, il a la position de l'astronaute dans une navette spatiale. Il pense qu'il n'aurait pas su fabriquer les briquettes thermiques qui en recouvrent le ventre, qu'il n'aurait pas su en calculer la disposition, même pas d'ailleurs les concevoir ni concevoir qu'elles dussent exister. Mais si ce n'était que cela. Il pense à une centrale nucléaire et se demande comment on peut fendre l'infiniment petit lui qui ne reconnaît que ce qu’il voit. Mais si ce n'était que cela. Il pense à la télévision et se demande comment une image peut apparaître d'un chatoyant bocage de fils, de transistors et de circuits imprimés, de toute cette tripaille dont il ne peut comprendre le tout puisque l'infime partie du tout lui est, de toute manière, totalement étrangère, tandis qu’il ose à peine se déshabiller devant le poste de peur que la speakerine ne le regarde. Mais si ce n'était que cela. Il pense à l'automobile et se demande comment en est-on venu, un jour, à la mouvoir avec des chevaux plus évanescents que des chevaux sauvages. Mais si ce n'était que cela. Il pense à une ampoule électrique et se demande comment le feu peut s'y produire ; comment le courant peut y courir ; et par quelle magie l'eau peut nourrir un tel prodige. Mais si ce n'était que cela. Il pense à son électrophone et se demande comment une musique peut sortir du contact d'une aiguille et d'une plaque de cire noire, lui qui ne sait même pas fabriquer une aiguille à coudre que la finesse épouvante et plus encore la petitesse du chas. Mais si ce n'était que cela. Il pense au métal dont elle est faite et se dit qu'il ne sait ni l'extraire ni l'allier. Et si ce n'était que cela. Il pense qu'il ne sait pas faire le feu autrement qu'en grattant une allumette et que de toute façon, il ne sait pas faire une allumette. Il se demande s'il aurait pensé à la roue. Il se demande s'il se serait demandé. Il se demande à quoi lui auront servi deux millions d’années d'humanité. Et il se sent comme un chat de gouttière, la nuit. Laissant autour d'une poubelle entrouverte les reliefs de sa consommation".
Extrait de "Janus" Hervé Rostagnat. Roman. L'Altérité.